La République et les langues
Description
Dans nos représentations et nos débats, les langues sont pensées
sous un angle social, sociétal, culturel, identitaire, ou simplement utilitaire,
mais très rarement linguistique, à savoir : comme des constructions intellectuelles
qui produisent du sens.
Ce silence va de pair avec leur instrumentalisation dans des relations de pouvoir,
de conflictualité, de hiérarchie, jusqu’au suprémacisme.
De telles dérives sont bien présentes dans l’histoire de la France,
où l’État a contribué à l’institution d’une langue nationale, mais aussi rencontré
d’autres langues, parlées par ses ressortissants dans l’égalité citoyenne ou l’inégalité
coloniale, et mené, selon les langues et les époques, des politiques variables
mais le plus souvent défavorables, en particulier à l’école. La position dominante de la
langue française se double d’un idéal d’homogénéité, qui en délégitime
toute variation, et met ses locuteurs dans l’insécurité.
Mais si l’on applique à la grammaire du français – et de toute langue –
une analyse rationnelle et dépassionnée, on met à jour des solutions également plausibles
à des problèmes de signification, ouvrant un espace au plaisir intellectuel, à l’admiration de
l’ingéniosité individuelle et collective des êtres humains, et à l’apaisement
– car, contrairement aux religions, les langues admettent plusieurs appartenances.
A propos de l'auteur
Michel Launey est linguiste.
Ses recherches ont d’abord porté sur la langue nahuatl au Mexique,
puis il a travaillé en Guyane dans le cadre du Centre d’études des langues indigènes
d’Amérique.